Retour vers Mai 2021

Après Palmer Wild Story et Le Tournesol qui n’ont fait qu’accroître l’engouement autour de lui, Khali a dévoilé avec LAÏLA le premier long format de sa jeune carrière. Composé de 11 titres, LAÏLA accueille une collaboration avec Chanceko mais surtout un large panel de producteurs dont Kosei avec qui Khali avait pu collaborer sur le projet KOLAF (La Fève X Kosei). À l’image de sa cover (scindée en deux), ce projet regorge de prods très différentes que ce soit en termes d’instruments utilisés (piano, guitare, instruments orientaux), d’ambiances véhiculées, de drums ou bien d’effets en tous genres. Millionaire dans ses sonorités, l’aspect musical viendra renforcer la voix originale et singulière de Khali qui pourra alors se permettre de placer des échos, des hachures ou bien de la saturation. Introspective à son paroxysme, son écriture dégage une grande maturité sur le monde qui l’entoure et une tristesse profonde qui laisse quelques fois ressortir des rayons de soleil. Abouti que ce soit dans ses sonorités, dans son écriture et dans la construction de ses morceaux, LAÏLA s’affiche comme l’un des projets les plus marquants de cette année et confirme que Khali est un artiste à surveiller de très (très) près.

Un an après le supposé dernier projet de sa carrière, Bénédictions, La Fouine nous a dévoilé XXI, son neuvième album. Avec un engouement à la baisse autour de lui La Fouine se devait de répondre présent avec des titres cohérents et en phase avec les tendances actuels… ce que l’on ne retrouvait pas dans ses derniers projets. Sur XXI La Fouine aura fait confiance à des beatmakers différents et peu connus comme par exemple VVS Beats qui sera présent sur quatre titres dont les ambiances sont toutes très différentes. Justement, ces ambiances variés seront reparties tout le long du projet avec des titres drill comme « Millions » ou « Sacoche », des potentiels tubes sur « Billet de 500 » (feat Kofs) et « Comment on fait », mais aussi très mélancoliques et introspectifs avec « Pardonne-moi » et « Dans la zone ». En termes d’écriture La Fouine sera resté fidèle à lui même avec des jeux de mots, des punchlines légères ou crues, mais aussi avec des textes très personnels particulièrement bien écrits qui font ressortir toutes ses émotions. Ces ambiances bien maitrisées, tout comme ses écrits, seront accompagnées de flows et de backs qui coulent de source et qui ne donnent pas un rendu forcé (faire un tube pour faire un tube). En bref ce projet est plutôt réussi et montre un La Fouine beaucoup plus ancré dans son époque que sur ses derniers projets.

Après un 3 titres intitulé Jacobins Plavace continue son entrée au sein du paysage rap français avec son premier EP : Voltaire. Nommé en référence à une place lyonnaise, tout comme Jacobins, Voltaire mettra, encore une fois, à travers ses 7 titres la ville à l’honneur. En effet on pourra retrouver Lyon que ce soit dans les écrits des trois artistes (Libre Penseur, Semo et Atsy) ou bien dans les visuels comme par exemple le clip de « Chat Noir » (feat Tedax Max) qui met en scène le collectif dans de nombreux lieux de la ville. Obscur et en adéquation avec la tendance musicale actuelle, ce projet sera une démonstration de kickage. Pas de place pour le chant, le trio enchaîne les passes-passes, les flows rapides ou lents, et dissémine de nombreuses références au rap français (Nubi, Lunatic, Temps Mort), à sa ville (lieux clés) ou bien à la pop culture en général. Pour le dernier titre, « Capsule Corp », les trois artistes, qui font d’ailleurs preuve d’une grande alchimie, seront mis de côté pour laisser place à Morfal (seul beatmaker du projet avec Purpey) qui signera deux minutes d’instrumentale planante. Que ce soit dans la construction des titres, dans les écrits ultra référencés et techniques des artistes ou bien dans les prods puissantes, Voltaire est un projet très intéressant qui ne laisse présager que du bon à venir de la part de Plavace.

Nous tenions à adresser nos plus profondes condoléances à la famille d’Olivier Kieny, membre du collectif décédé peu de temps après la sortie du projet.

Révélation de la don dada mixtape vol. 1, Ratu$ a dévoilé son premier projet intitulé Tout Travail Mérite Salaire. Composé de 7 titres, ce projet accueille des artistes proches de Ratu$ que ce soit sur le plan personnel ou musical. En effet on peut y retrouver Alpha Wann, Infinit’ et K.S.A qui font parties de son entourage proche, mais aussi Olazermi, Crones et OG L’enf qui se rapprochent de son style de rap cru et imposant de par le flow et la voix. Avec un nom de scène inspiré du mot « rat », qui sera d’ailleurs abordé à l’aide d’une voix off dès les premières secondes du projet, l’obscurité, qui est le pilier de son univers artistique, aura de fait une place prépondérante au sein du projet. Cette ambiance sombre, voir horrifique, on pourra la retrouver sur les titres « ENTRETIEN », « 93P » (feat Olazermi et Crones) et « FICHE DE PAIE » (feat OG L’Enf) qui mettent en avant sa voix, son soucis du détail lors de la construction de ses morceaux, mais aussi son talent de kickeur. Ce talent se manifestera d’une manière différente sur « RÉUNION » qui accueille Alpha Wann, Infinit’ et K.S.A et qui aurait très bien pu figurer sur la don dada mixtape de par sa prod et les flows utilisés. Premier projet, donc carte de visite, Tout Travail Mérite Salaire met en valeur sa polyvalence avec des titres comme « SURTAXE », « NOUVEAU POSTE » et « FIN DE SERVICE » qui sont plus doux avec des prods estivales et des refrains chantonnés. Avec un premier projet globalement réussi Ratu$ impose son univers et confirme les attentes suscitées autour de lui après le très bon « velux » sur la don dada mixtape vol. 1.

Après trois ans d’absence sur le devant de la scène Sofiane a effectué son retour avec son troisième album : La Direction. Nommé comme tel en référence à ses activités dans l’ombre exercées ces dernières années, La Direction sera beaucoup plus introspectif que les précédents projets et abordera principalement sa place de producteur influent au sein de l’industrie du rap français que ce soit dans ses textes ou dans ses sonorités. Le premier titre, « Zidane », donnera d’emblée le ton : Sofiane est le patron, le numéro 10 du rainté. Parfaitement représentatif de l’univers artistique de Sofiane dans le choix de la prod ou dans sa manière de rapper, la prestance affichée sur « Zidane » sera présente tout le long de l’album. Ce coté patron, directeur et chef d’entreprise sera également exploité grâce à un champ lexical varié (série, film, religion, hommes d’affaires, industrie de la musique) qui reste fidèle au thème principal de l’album. En leader Sofiane conviera sur La Direction les différents artistes qui composent son label, à savoir Soolking, Sifax et ZeGuerre, et les mettra dans de parfaites conditions sur des titres en phase avec leurs univers artistiques respectifs qui font donc ressortir tout leur potentiel. Outre ces derniers on pourra aussi retrouver Kenem, un inconnu (pour l’instant), qui livrera une très grosse performance avec une voix et un flow original, et qui montrera surtout que Sofiane a les yeux sur tout ce qui se fait. Réussi, car varié, La Direction contient de potentiels tubes comme « Case Départ » ou « Nouveaux Parrains » qui affichent encore une fois un soucis d’écriture sur des titres plus chantés qui peuvent côtoyer la variété. Abouti de A à Z avec un thème respecté tout le long, une écriture toujours aussi bonne, des invités efficaces et performants, et des sonorités variés, La Direction s’affiche surement comme l’un des albums majeurs de l’année et montre que Sofiane n’a rien perdu de sa superbe.

Petit nouveau au sein du paysage rap français, Yara a dévoilé ce vendredi 21 mai son premier projet, l’EP Vertigo. Membre du label Double M Music, ce projet sera logiquement produit par Madizm. Composé de 7 titres, cet EP expose une grosse force de frappe de la part du rappeur issu du « 100 – 9 ». Cette puissance est surtout due à une très grande maitrise du kickage qui transpire le rap pur et dur, mais aussi à un gros travail en ce qui concerne la construction de ses morceaux. Sur « Plan B » Yara nous frappe dans les cotes et fini avec 40 secondes très douces, planantes et surprenantes. Sur « 100 – 9 » la jeune pépite jouera avec la prod qui ralentie pour repartir sur un kickage encore plus fort. Ces ralentis parsemés au milieu d’énormes kickages on pourra également les retrouver sur « D.T.D » où la prod y est plus ténébreuse que sur « Plan B » ou « 100 – 9 ». Ces trois premiers titres exposent donc parfaitement son talent de kickeur, sa grande alchimie avec un Madizm qui le met dans de parfaites conditions avec des prods phénoménales, mais aussi un gros niveau en termes d’écriture avec des lyrics efficaces qui ne tournent pas en rond. Les deux derniers titres feront ressortir toute la polyvalence de Yara avec des morceaux moins agressifs dans les prods ou dans les thèmes abordés. Epaulé par un Madizm en feu, Yara délivre un très (très) bon premier projet et s’affiche déjà comme un artiste à surveiller avec la plus grande attention.

Petit nouveau au sein du rap français, A2Z a dévoilé avec Baby Mafia le premier projet de sa jeune carrière. Composé de 18 titres, Baby Mafia est défini comme une mixtape et accueille des collaborations avec Kalash Criminel, Larry, DA Uzi, Skoffi, Yasser et Bomayé. Publié en guise de carte de visite, ce premier projet possède des points forts comme des plus faibles. En ce qui concerne les points forts on peut tout d’abord noter la présence de titres variés (chantés, mélancoliques, rappés) qui montrent déjà qu’A2Z ne souhaite pas s’enfermer dans un style précis. Ces variations de styles passent assurément par de bons choix en termes de prods comme sur « Voix dans ma tête » et « Rêves Bleu » où Urbs & Di Cee et Cello font un très très gros travail. En ce qui concerne ses écrits, qui peuvent êtres autant un point fort qu’un point faible, A2Z signera de bonnes prestations sur « Mes Rêves » ou « Elle était là » mais apparaitra un peu répétitif sur des titres comme « Bénéfice » ou « Claire Chazal ». En ce qui concerne les points faibles on peut noter des détails comme des prods brouillonnes sur « Maintenant », la présence d’un Kalash Criminel qui se limite à un refrain alors que la prod lui est favorable ou bien tout simplement la longueur du projet qui aurait très bien pu être un EP de 8/10 titres. Au final Baby Mafia est un projet intéressant qui permet à A2Z de se présenter. À voir ce que cela donnera sur un album plus travaillé dans sa construction et dans son écriture.

À l’image de deux étoiles qui explosent et forment une supernova, DTF a dévoilé son cinquième projet, Double Star. Sorti moins d’un an après l’album On ira où ? (nommé en hommage à leur ancienne cité Gargarine détruite), le duo continue sur sa lancée et livre un projet où la « tristesse enjolivée » y est omniprésente et maîtrisée à la perfection. Ici RKM et RTI ont fait le choix de n’inviter aucun artiste pour laisser parler leur symbiose. En termes de productions on peut retrouver des beatmakers confirmés comme Yann Dakta & Rednose, RJacks & Masta mais aussi Slaik qui compose essentiellement pour DTF et qui est présent sur 7 morceaux (sur 16). Les instrumentales de chacun s’ajouteront à une autotune et des backs bien maitrisés qui viendront embellir des écrits dont les thèmes récurrents sont l’amertume de la vie ou le travail accompli jusqu’ici. Homogènes mais loins d’être répétitives, les ambiances véhiculées permettent de susciter, comme il faut, un sentiment de nostalgie permanent chez l’auditeur. À l’image d’un duo comme Djadja & Dinaz, DTF livre à chaque projet un rendu toujours plus qualitatif, et cela en tout point.

Un peu plus d’un an après la sortie de son premier projet, Le Mal est fait, le grand espoir du 77, ISK, nous a dévoilé son premier album intitulé Vérité. Composé de 17 titres, ce projet accueille de collaborations avec Alonzo, DA Uzi, Niro, Sofiane et UZI. Avec des titres qui jusqu’ici étaient dans le même registre et assez sombres, ISK se devait alors de montrer une palette artistique plus large avec Vérité. Bingo ! C’est exactement ce qu’a fait le parisien sur ce projet. Dans la lignée de ses séries de freestyles « Acharné » et « Vérité » ISK livre plusieurs titres sombres et rappés avec une voix agressive comme par exemple « Tchernobyl », « Sakrane » ou « Jamais on doute » qui témoignent que ce dernier maitrise très bien sa base artistique. Avec des titres ténébreux et très rappés qui ne peuvent pas décevoir son public fidèle, Vérité s’affiche alors déjà comme une réussite. En plus de cela l’album présente plusieurs prises de risques à l’image de « Trou à Rat » qui est très estival dans ses sonorités et dans les flow pratiqués ou bien « Le Billet » qui s’affiche clairement comme un son club. En plus de ces ambiances variées ISK aura livré sur Vérité un très gros travail en ce qui concerne la construction de ses morceaux, l’écriture, le choix de ses prods (Noxious, Amine Farsi, DST The Danger ou Boumidjal) et aura montré qu’il est complet dans de nombreux domaines. Véritable réussite, ce premier album confirme que ISK est assurément l’une des têtes d’affiches de demain.

Après la sortie de En attendant la popance les différents membres de Lyonzon ont entrepris plus sérieusement une carrière solo et ont su chacun conserver l’audimat qu’ils avaient avec leur groupe. Signé chez AWA depuis début 2020, et poussé par le succès d’ASHE22 (et dans une moindre mesure de Bu$hi et Kpri), le collectif se devait alors de revenir sur le devant de la scène avec le deuxième volume de ce projet phare. Sur ce dernier, composé de 15 titres, on retrouve bien évidemment la patte artistique de Lyonzon à savoir des textes crus, une « no mélo » assumée et un flow nonchalant presque parlé sur des instrumentales monotones. Très (très) uniforme, En attendant la popance 2 accueillera de légères originalités comme « Origami » ou « Flamengo » qui dans leurs sonorités et flows sont plus dynamiques. En réalité ce projet, qui rappelons le est une mixtape, sert surtout à ne pas voir disparaitre l’engouement autour de Lyonzon. À la vue de ce projet les membres du groupe apparaissent plus intéressants en solo comme par exemple Bu$hi qui a livré les très bons Bushi et Bushi 1.5.

Présent depuis maintenant près de trois ans avec des projets qui avaient pour but de se présenter artistiquement tout en cherchant son bord musical, Squidji a enfin dévoilé son premier album : OCYTOCINE. Composé de 17 titres, ce dernier accueille des artistes différents comme Josman, Disiz la Peste, Lala &ce ou Lous and the Yakuza qui restent néanmoins en phase avec l’univers imposé par Squidji. Construit en storytelling autour d’un thème, celui de l’amour, le bien nommé OCYTOCINE (hormone de l’amour) se verra être parsemé d’interludes (parlées ou chantées) plus ou moins longues qui ajouteront une cohérence au projet. Décrivant les différentes humeurs du processus amoureux, cet album sera logiquement varié en terme de musicalité (prods agressives, douces, mélancoliques, nostalgiques, gospels) et accueillera des producteurs de rang comme Ponko, Prinzly, Ikaz Boi ou Paco Del Rosso, pour ne citer qu’eux. En ce qui concerne ses écrits Squidji livrera des textes très introspectifs et tristes mais aussi joyeux et egotrips qui seront en phase avec toutes les émotions voulant être procurées. Avec un storytelling efficace, des titres particulièrement bien construits, une musicalité variée et touchante, et des écrits soignés, Squidji livre avec OCYTOCINE un très bon premier album qui ne laisse présager que du bon pour la suite.